Kevin Pellouchoud, l’homme de l’ombre qui fait gagner l’UDC valaisanne
Chef de campagne et vice-président du parti, le trentenaire n’est pas une des figures de proue de sa formation. Mais, réalisant les tâches ingrates, il représente un maillon d’une chaîne qui ne cesse de progresser, élection après élection. Et ce dimanche confirme cette tendance, l’UDC est dans le camp des gagnants.
Grégoire Baur, Le Temps
La scène résume l’homme. Seul, devant son ordinateur, dans un stamm du parti encore vide, Kevin Pellouchoud est déjà en place, prêt à suivre attentivement ce dimanche d’élections cantonales en Valais. Derrière le vice-président et chef de campagne de la section romande de l’UDC valaisanne, l’horloge affiche 11h20 et la télé locale passe une émission en rediffusion. Le suivi de la journée électorale, en direct, ne commencera que dans quelques heures. Kevin Pellouchoud, lui, s’est levé six heures plus tôt. Inquiet du faible taux de participation annoncé, préoccupé par le résultat que fera son parti, il n’a que peu dormi.
Profitant d’une tendance positive depuis de nombreuses années, l’UDC ambitionnait de devenir la deuxième force du parlement cantonal, derrière Le Centre. L'objectif n'est pas rempli, mais de justesse. Lors de la prochaine législature, l'UDC aura 26 députés, soit un seul de moins que le PLR, qui a conservé ses acquis. Mais, en empochant 4 sièges supplémentaires, elle est la grande gagnante des élections de ce dimanche. Et Kevin Pellouchoud, l’homme de l’ombre, n’y est pas totalement étranger.
«Notre objectif est rempli. Ce gain de sièges matérialise notre progression et nous aurons plus de poids dans les commissions parlementaires», se réjouit le chef de campagne. Au stamm, les partisans l'ont rejoint depuis plusieurs heures désormais, débouchant quelques crus locaux durant l'après-midi. Kevin Pellouchoud, lui, n'a pas changé de place. Toujours à la même table, toujours derrière son ordinateur, à scruter les résultats. «C'est le genre de type indispensable dans un parti. On lui doit énormément», assure Oskar Freysinger, le fondateur de l'UDC valaisanne, qui a porté le parti durant près de deux décennies. L'ex-tribun avoue être admiratif devant le travail abattu par Kevin Pellouchoud, qui réalise «des tâches essentielles, ingrates, mais plus importantes que celles des politiciens qui ont la tchatche en public».
«Un bon chef d'orchestre»
«Dévoué à la cause», Kevin Pellouchoud est donc «un des maillons importants de la chaine», mais aussi «le liant de l'action politique du parti» et «un bon chef d'orchestre», selon les mots de Cyrille Fauchère, l'ancien président de l'UDC du Valais romand. «Il pense à tout, au photographe, au graphiste, aux entreprises qui peuvent réaliser des bâches ou des affiches. Grâce à lui, chaque candidat gagne un temps précieux et appréhende moins la campagne», assure Cyrille Fauchère. Ces tâches, Kevin Pellouchoud les réalise bénévolement depuis une décennie. Pour «accepter d’en faire autant, il faut avoir un petit côté masochiste», sourit Jérôme Desmeules, le secrétaire général du parti, assis aux côtés de Kevin Pellouchoud. Le principal intéressé, lui, préfère parler de passion pour la politique, comme d'autres sont mordus de sport. Célibataire, il reconnaît n'avoir pas grand-chose d'autre dans la vie que son travail d'enseignant et cet amour de la chose publique.
L’humain d’abord, voilà le créneau de Kevin Pellouchoud
Hier matin, avant de rejoindre le stamm, il a appliqué la même routine qu'il s'impose chaque jour d'élection. Il s'est rendu dans l'Entremont, à Champex-Lac, son village d'origine, pour prendre le café loin du tumulte et commencer la journée dans le calme. Il s'est ensuite rendu au cimetière d'Orsières, pour un moment de recueillement sur la tombe de ses grands-parents. «Je le fais depuis que mon grand-père est décédé, car il m'a toujours soutenu dans mon engagement politique», glisse Kevin Pellouchoud. Etape suivante: l'église du village pour y allumer une bougie afin que la journée se passe bien, «même si on sait que ça ne dépend pas de cela» sourit-il. Il sait que cette tradition «fait un peu cliché», mais il assume être un homme de droite, un peu conservateur, avec des valeurs et des racines que lui ont transmises ses aïeux. Les mêmes que celles défendues par son parti.
Et puis le téléphone a commencé à sonner et son travail de chef de campagne a repris ses droits. Au bout du fil, explique-t-il, «mes» et non «les» candidats, qui sont «un peu comme une famille». Il leur a d’ailleurs écrit un mail à tous pour les remercier de leur engagement et les inviter à retenir, même s’il y aura des déçus, «la formidable expérience humaine» qu’aura été cette campagne. L’humain d’abord, voilà le créneau de Kevin Pellouchoud. «C’est cela qui le rend différent à l’heure des réseaux sociaux et des SMS, assure Jérôme Desmeules. Il privilégie les contacts humains, se rend dans toutes les sections du parti, va voir les gens et prend le temps de discuter avec tous les candidats.» Kevin Pellouchoud dit tirer ce trait de caractère de son travail d’enseignant, mais aussi d’une mauvaise expérience personnelle de candidat, se retrouvant seul et envahi par le spleen au lendemain d’une élection. Et il ne veut pas que «ses» candidats se retrouvent dans une telle situation.
«Un travail invisibilisé»
Au stamm, au fil de la journée, les sourires se dessinent sur les visages. Lorsqu’on lui demande si la progression de l’UDC valaisanne ces dernières années lui est due, l’homme préfère mettre en avant le nouvel état d’esprit du parti, qui fait moins de politique spectacle. A ses côtés, un jeune sympathisant le coupe: «Ne sois pas modeste, tu abats un travail énorme, souvent invisibilisé!» Un travail qui se termine, puisque Kevin Pellouchoud indique qu’il menait sa dernière campagne. Mais comment le croire, lui qui l’a déjà assuré à deux reprises par le passé avant de faire marche arrière?
- Vues : 269